Je n’aime pas les qualiticiens

Temps de lecture : 2-3 min

 

Ils compliquent trop souvent le management de la qualité.

 

Le poids du passé

Cela a déjà été dit et redit maintes et maintes fois, et pourtant, nous avons beaucoup de mal à changer nos modes de management de la qualité hérités du siècle dernier.

À l’origine, la qualité était sous la responsabilité d’un « service contrôle » et, de manière naturelle, celui-ci s’est chargé de la mise en œuvre des systèmes d’assurance qualité dans les années 1990, puis des systèmes de management de la qualité à partir des années 2000. Et lorsque ce service contrôle n’existait pas, parce que l’entreprise était de petite taille, on l’a créé dans cet état d’esprit.

Le travail des qualiticiens de cette époque, si l’on veut parler franc, ne consistait pas tant à améliorer la satisfaction des clients et à leur apporter plus de valeur ajoutée qu’à obtenir et à maintenir la sacro-sainte certification ISO. Cette fâcheuse approche a laissé des séquelles que l’on peut observer encore aujourd’hui dans les comportements de quelques qualiticiens.

 

Pourquoi faire simple ?

J’en appelle toujours au bon sens de ma chère grand-mère qui citait à tous propos quelques proverbes bien sentis et qui appelaient à la voix de la raison. Plutôt que d’écouter les clients internes que sont les processus de production mais aussi ceux de support, on préfère écouter un fournisseur qui est l’auditeur tierce partie, et faire de la surenchère documentaire avec ses homologues qualiticiens. C’est pour la bonne cause effectivement, autrement dit pour éviter tout risque de remarque désobligeante de la part dudit fournisseur. Or ceux-ci ne se permettent jamais de juger l’organisation en place si elle répond aux exigences de tel ou tel référentiel. Si c’est une usine à gaz, c’est le problème de l’organisme audité et il se débrouille avec.

C’est pour toutes ces raisons que les opérationnels (employés, opérateurs et autres gens de terrain), et trop souvent les managers, ont beaucoup de réticence à s’impliquer dans ces systèmes qualité dont ils ne perçoivent pas l’utilité au niveau de leur quotidien. Eh oui, ils ne sont pas construits pour eux mais pour les auditeurs tierce partie.

 

Parce que c’est simple

C’est pour ces raisons que nombre de qualiticiens ont beaucoup de mal à jouer ce nouveau rôle de support, c’est-à-dire d’aide à la production. On oublie d’écouter ceux qui y travaillent, or ce sont nos clients internes. Il faut les convaincre que la satisfaction des clients est la clé du succès durable, que cela nécessite de l’attention, des efforts et une amélioration continue des performances en matière de conformité mais aussi en matière d’efficience, d’agilité et d’innovation.

Au lieu de travailler dans ces directions porteuses de sens, on multiplie la complexité des systèmes documentaires, on invente des processus qui n’ont pas de réalité sur le terrain, on propose plusieurs processus de management, on dissocie les revues de processus des soucis de production, etc. Et puis surtout, on oublie d’intégrer la qualité et la performance dans le quotidien de tous. On oublie d’écouter, ce qui est la base du management de la qualité.

 

Yvon Mougin, consultant

 

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    • Bernard GUYOT
      Bernard GUYOT

      Oui effectivement, le management de la qualité n'est pas si simple. 

      Je sais que des qualiticiens ont été embauché pour faire obtenir la certification à l entreprise et uniquement pour cela. Démontrer la conformité au référentiel iso a été l objectif et le seul . L amelioration continue  , la satisfaction des clients  , la maîtrise des processus  , tout ça ne préoccupait pas les directions. 

      Heureusement il y a quand même eu des  " bons " qualiticiens pour réussir mais ce n'est pas facile. 

      • Yvon MOUGIN
        Yvon MOUGIN

        Bernard, oui je suis d'accord avec toi mais on pourrait (pour plaisanter) parodier le sketch des Inconnus qui à l'époque de leur gloire nous expliquaient la différence entre un bon chasseur et un mauvais chasseur :

        Un mauvais chasseur, c'est un type qui voit, tire et qui tue un animal. 

        Un bon chasseur c'est un type qui voit, tire et tue un animal ... mais c'est un bon chasseur.

         

        • Bernard GUYOT
          Bernard GUYOT

          Je crois Yvon que l ambiguïté vient du fait qu on a souvent oublié que la norme Iso n'est qu un référentiel de management de la qualité. Elle ne garantit pas que le fournisseur vous apportera un produit conforme à vos attentes. 

          J'ai souvent entendu dire d un fournisseur : il est bon il est certifié Iso .Moi je ne me suis jamais contente de cela pour sélectionner mes fournisseurs. 

           

          • Yvon MOUGIN
            Yvon MOUGIN

            Bernard, c'est très juste et dans une mêmelogique nous savons tous que le permis de conduire ne garantit pas que son possesseur conduit prudemment et intelligemment. 

            • Cathy BARRET-BEAUMARD
              Cathy BARRET-BEAUMARD

              Messieurs , en effet vous avez raison. Il est très difficile de changer les mentalités et d'installer l'amélioration continue dans les organisations.

              Dans mon secteur, j'ai aussi trop souvent vu des qualiticiens rester dans leur bureau et balancer sur des logiciels des documents à valider sans que les salariés concernés ne les aient jamais vus. Ils n'ont pas participé à leur élaboration alors qu'ils parlent de soins, de gestion de risques de services très spécialisés. 

              Il y a de quoi ne pas comprendre et se dégouter presque à jamais de la qualité. 

              Mais heureusement , cela commence à changer et un peu grâce à COVID. ...

              • Christophe GONZALEZ
                Christophe GONZALEZ

                Bonjour Yvon, j'ai une bonne blague.

                Vous dites que vous n'aimez pas les qualiticiens.

                - Vous vous considérez comme qui ? Quoi ?

                - En quoi êtes vous différent de ces qualiticiens ?

                • Yvon MOUGIN
                  Yvon MOUGIN

                  Christophe, je suis à la base un ingénieur "méthodes" c'est-à-dire un organisateur qui a découvert que la qualité pouvait être un facteur essentiel de performance durable. Et depuis, je fais partie de celles et ceux qui pensent qu'un certificat ISO n'est qu'une toute (toute) petite cerise sur le gâteau du management de la qualité.

                  L'expression qui pourrait (peut-être) me caractériser est "Fouteur de qualité". J'aime bien. 

                  Vous avez compris que mes textes de la rubrique "Je n'aime pas" appartiennent à la catégorie d'écriture que l'on qualifierait de "second degré" bien entendu. 

                  Mais au fait, où est votre blague ?

                  • Christophe GONZALEZ
                    Christophe GONZALEZ

                    @Yvon, vous étiez un ingénieur méthodes, aujourd'hui, êtes un qualiticien maintenant ;-) 

                    Vous avez été initié à la qualité par défaut de votre cursus. Donc, vous n'aimez pas les qualiticiens. C'est une boutade ou une blagounette... ;-)

                    • Jean-Marc GANDY
                      Jean-Marc GANDY

                      Tout à fait d'accord avec Yvon.

                      Et cette chronique devrait tous nous amener à une vraie réflexion de fond. N'a-t-on pas trop souvent galvaudé et perverti la notion de qualité, la vraie Qualité ?

                      Car la vraie Qualité orientée "client" et "amélioration continue", celle que la norme ISO 9001:2015 souhaite privilégier, n'est certainement pas celle des "apparences documentaires", ni celle des titres plus ou moins prestigieux, ni celle des langages ésotériques réservés à quelques "initiés"...

                      Un titre de poste pour remplacer les appellations traditionnelles ? Et pourquoi pas "Facilitateur Qualité"... :)

                      • Christophe GONZALEZ
                        Christophe GONZALEZ

                        @Jean Marc, je suis interrogatif... ce n'est pas contre vous ou @Yvon

                        Je me demande pourquoi remettre en question les qualiticiens et leur fonction... Pourquoi ? Puisque le métier en lui même est de remettre en question ce qui est établi pour l'améliorer (le PDCA). Je n'invente pas la roue ! ;-)

                        C'est dans notre ADN de remettre en question l'existant et de remettre en question (nos savoirs, nos postures, ... ) pour évoluer avec de nouvelles pratiques. C'est un non sens !

                        Le constat ne peut pas s'inclure que sur une fonction "Je n'aime pas les qualiticiens". L'entreprise, le management, le contexte économique, le sens du travail, les postures, les comportements, les attitudes, tout évolue... Comment le rendre meilleur ou veut on le rendre meilleur, plus durable ?

                        J'ai aussi des questions : pourquoi vouloir renommer une fonction ? Est elle appropriée ? Pourquoi est autant dévaluée depuis toujours ? 

                        Ceci est un constat parmi nos confrères. Mauvais ou bon ? C'est dans tout les métiers et on peut l'être à un moment de sa carrière dans une organisation ou une autre. Tout dépend son fonctionnement et sa gestion managériale.

                        Notre métier touche à toutes les fonctions de l'organisme dont la stratégie d'entreprise. Sachant que nos deux véritables fonctions sont l'Excellence Opérationnelle de Maturité Métiers et la Performance Stratégique Durable. Je vous laisse trouver un nom si vous le souhaitez ... ;-)

                        Les deux vraies questions à poser sont "Par quels moyens la Direction peut être se remettre en question pour utiliser l'ISO 9001 comme rampe de lancement vers l'Excellence ?" et surtout "Quand ?" avec le " Comment on l'organise ...

                        J'attends vos partages... Merci Jean Marc et Yvon

                        Christophe

                        • Jean-Marc GANDY
                          Jean-Marc GANDY

                          @Christophe

                          Je pense qu'Yvon et moi-même aimons souvent un peu jouer aux "provocateurs" mais c'est bien sûr pour la bonne cause. Parfois il peut s'agir de "second degré" pour aider à prendre plus de recul sur ce qui est réellement important. Ce qui ne devrait pas vous poser de problème puisque vous aimez les blagues et blagounettes… :-)

                          Cela étant, en ce qui me concerne, j'observe souvent dans les entreprises que le rôle du responsable qualité n'est pas suffisamment orienté dans le sens d'une logique profonde de réelle satisfaction client, de prise en compte des parties intéressées et d'amélioration continue. La responsabilité en revient d'ailleurs le plus souvent aux Directions qui se contentent d'un "vernis qualité", des apparences plus que du fond. Ayant été, dans une autre vie, animateur puis responsable qualité, j'ai bien conscience des murs qui peuvent se dresser côté "Direction".

                          Donc je ne jette pas la pierre aux responsables qualité même si certains ne jouent pas pleinement le rôle qu'ils auraient pourtant la possibilité de jouer.

                          Aux questions difficiles mais pertinentes que vous posez "Par quels moyens la Direction peut se remettre en question pour utiliser l'ISO 9001 comme rampe de lancement vers l'Excellence ?" et surtout "Quand ?" avec le "Comment on l'organise", je répondrais ceci :

                          1) Provoquer une prise de conscience de la Direction : toute l'équipe de direction doit être concernée sans exception. Il est vital que le responsable qualité (peu importe sa dénomination) ait au préalable une position suffisamment forte pour être entendu. Il ou elle doit souvent "négocier" sa place au sein de l'équipe de direction…

                          Le responsable qualité pourra s'appuyer sur des sources extérieures pour renforcer ses messages. Par exemple, inciter chaque responsable à s'inscrire et à consulter le site Parcours Croisés. Il sera même souvent utile de leur imprimer certaines chroniques et articles publiés sur cette riche plateforme. Leur faire lire un ouvrage pragmatique abordant l'esprit profond de la qualité et des SMQ. Les inciter à participer à d'un club "qualité" régional. Recourir à un intervenant extérieur pour une petite "animation-choc" (2 heures suffisent avec mini-conférence et questions-réponses), etc.

                          2) Présenter par avance un plan d'action Qualité, le plus précis possible, intégrant tous les aspects qui seront abordés dans la démarche de mise en place ou d'évolution du SMQ.

                          3) Liste bien sûr non limitative…

                           

                          • Christophe GONZALEZ
                            Christophe GONZALEZ

                            @ Jean Marc & @Yvon, je vous ai un peu chatouillé sur le sujet. Oui j'aime taquiner "le poisson" ;-) et ça a bien mordu ... @ Jean Marc, j'ai apprécié votre commentaire merci !

                            Vous avez été animateur, responsable qualité et vous êtes consultant Qualité = Donc un qualiticien dans une approche factuelle. ;-)      donc, je ne vous apprends rien LOL

                            Ce qui m'interpelle, c'est que l'on met "même avec une pointe de provocation" toutes les responsabilités sur le "Qualiticien".

                            Il faut toute précaution gardée avoir un juste milieu, j'ai apprécié dans les organismes il y a juste un "vernis qualité". On oublie un peu vite parfois la direction n'apporte son soutien sur :

                            - un transfert total du leadership sur le qualiticien,

                            - une absence de moyens et de ressources,

                            - une vision stratégique pour mettre en place une vraie culture qualité performante,

                            et avec parfois, il y a un contexte encore dans l'organisme à la "Don Camillo et Peppone "

                            Nous sommes dans un moment charnière où un tournant sur l'innovation éco durable et managériale qui peut être enclenchée.

                            Si on ne met pas un frein à l'immobilisme dixit Coluche !

                            J'émets juste un souhait, c'est de donner une vraie chance à l'ISO 9001 : 2015 ou 2025 de faire son réel travail ainsi qu'aux auditeurs externes d'avoir une "vraie" posture de Valeur Ajoutée.

                            Avec le plaisir de vous lire @Christophe

                            • Yvon MOUGIN
                              Yvon MOUGIN

                              Jean Marc, je n'aurais pas dit mieux. Vive ISO 9901 et la valeur ajoutée

                               

                              • Jean-Marc GANDY
                                Jean-Marc GANDY

                                @Christophe 

                                Tout à fait d'accord avec le fait que l'on ne peut absolument pas imputer toutes les dérives d'application de l'esprit de la norme ISO 9001 sur les qualiticiens.

                                D'ailleurs je relève régulièrement dans les chroniques que je publie le rôle essentiel des Directions, lesquelles sont très fréquemment responsables ce ces dérives. Exemples de mes chroniques : " Leadership et engagement de la direction, sujets parfois brûlants""ISO 9001:2015 et qualité du management", etc. De plus, un prochain livre blanc à paraitre en décembre sur Parcours Croisés comporte un second chapitre intitulé "La qualité à tous les étages. Tous concernés jusqu'au PDG !"

                                Je ne fais pas qu'écrire sur le sujet. Il s'agit aussi d'un message prioritaire que je délivre oralement face aux dirigeants avant de débuter une mission. Si nous ne sommes pas alignés dès le départ sur le rôle primordial de la Direction en tant que moteur de la qualité, avec une analyse des risques et opportunité à ce niveau, alors je ne prends pas la mission.

                                • Christophe GONZALEZ
                                  Christophe GONZALEZ

                                  @Yvon, l'ISO 9901, je ne connais pas. Pouvez-vous l'expliquer parce que je n'ai rien trouver dans ma mémoire et sur internet ?

                                  Cordialement

                                  Christophe...

                                  • Yvon MOUGIN
                                    Yvon MOUGIN

                                    Christophe, c'est nouveau, cela vient de sortir !! Vous aurez rectifié de vous même.

                                    • Christophe GONZALEZ
                                      Christophe GONZALEZ

                                      Je suis désolé, mais, je ne comprends pas ! Pouvez-vous nous transmettre un lien vers cette nouveauté... Je vous remercie d'avance @Yvon.

                                      Cordialement,

                                      Christophe

                                      • Yvon MOUGIN
                                        Yvon MOUGIN

                                        Il s'agit d'une norme intitulée "Système d'unité pifométrique".

                                        Pas de lien, (je la vends très cher) mais voici un extrait ci-dessous :

                                        3 - Règles de la pifométrie

                                        Les règles de la pifométrie n'ont jamais été rédigées mais chacun les applique d'instinct.

                                        Ce document n'a pas l'ambition de les citer toutes, mais seulement les principales:

                                        Règle 1: Le produit d'une unité pifométrique par un scalaire quelconque est égal à l'unité

                                        pifométrique initiale.

                                        EXEMPLE : "Deux minutes, s'il vous plaît !" ou "Trois minutes, s'il vous plaît !"

                                        représentent exactement la même durée que "Une minute, s'il vous plaît !".

                                         

                                        Un autre extrait à propos du vocabulaire

                                        4 - Les unités du système pifométrique

                                        4.1 - Unités de quantité

                                        4.1.1 le fifrelin : unité de petite quantité. Le synonyme est le chouia.

                                        EXEMPLE: Mon salaire a augmenté d'un chouia

                                        4.1.2 la tapée : unité de grande quantité.

                                        EXEMPLE : J'ai une tapée de normes à me farcir.

                                        4.1.3 la palanquée : unité de grande quantité.

                                        EXEMPLE: J'ai une palanquée de P.V. en retard.

                                        4.1.4 la flopée : unité de grande quantité.

                                        EXEMPLE: À la réunion du SC92, il y avait une flopée de délégués Allemands.

                                        4.1.5 la chiée : Synonyme très populaire, voire trivial, des unités définies de 4.1.2 à 4.1.4.

                                        Aucun exemple n'est cité pour conserver à ce document une certaine dignité.

                                        Signalons toutefois les multiples bien connus: la mégachiée et la

                                        tétrachiée.

                                        4.1.6 la lichette : unité de petite quantité souvent associée à une notion de minceur.

                                        EXEMPLE: Ma prime ?... Une lichette !

                                         

                                        • Jean-Marc GANDY
                                          Jean-Marc GANDY

                                          Excellent Yvon... En revanche je ne sais pas s'il y a actuellement assez d'auditeurs par tierce partie maîtrisant les exigences de cette norme ISO 9901...

                                          • Cathy BARRET-BEAUMARD
                                            Cathy BARRET-BEAUMARD

                                            En effet, pour la 9901 , les auditeurs sont très rares et chers !!!

                                            • Aicha BENZAID
                                              Aicha BENZAID

                                              L efficacite d un systeme de management depend d abord de l engagement de la direction.Ensuite une bonne communication sur la finalite de la demarche.Reste le comment mettre en place un systeme de management utile a l entreprise.Ceci reste lie a l expertise du chargé du projet et de l équipe projet. Le ou les qualiticiens  sont soit pas assez formees soit ne maitrisent pas les metiers de l entreprise. En effet c edt un travail d esuipe pour l esuipe et pqr l esuipe.Surtout pas pour l auditeur.