RQSE et R&D

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L’activité de recherche et développement (ou R&D) donne aux entreprises la capacité d’aborder le futur, en développant les produits de demain. Le ROME[1] prévoit que le responsable QSE (RQSE) soit partie prenante de ce processus.

 

Une description déconcertante

La fiche H1502[2], en face du savoir-faire « Conception », indique sobrement : « Mettre en place une procédure de traitement des dossiers ». De quels dossiers s’agit-il ? Cela reste un mystère. S’il s’agit des dossiers de conception, la procédure ne semble pas la réponse la plus appropriée. D’une part, parce que les procédures sont rarement, à elles seules, des moyens efficaces pour maîtriser un risque quelconque. Au minimum, il faut y ajouter de la formation, et, bien souvent, un accompagnement des personnes impliquées pendant un temps assez long. D’autre part, parce que le RQSE n’est pas le plus compétent pour l’écrire.

Et surtout, la conception d’un produit, d’un service, d’une organisation ne se résume pas à « traiter un dossier ».

 

Une activité cruciale

La phase de conception, c’est le « Plan » du PDCA de Deming[3]. C’est ce qu’il ne faut surtout pas rater. L’essentiel des problèmes qui surviendront au cours de la vie du produit (et qui devront être pris en charge par les qualiticiens) proviennent d’une conception mal maîtrisée : spécifications du produit comme spécifications des matières premières ou composants mal définies, processus de production insuffisamment maîtrisé car pas assez testé (que la production soit faite en interne ou qu’elle soit sous-traitée), vieillissement simulé par des tests non validés, équipements de mesure inadaptés au besoin de contrôle, moyens de communication entre parties intéressées défaillants, etc. C’est vrai tout au long du cycle de vie : une des difficultés rencontrées aujourd’hui dans le recyclage des batteries pour véhicules électriques vient du fait que le fabricant ne les a pas conçues pour être démontées.

L’industrie pharmaceutique a même fait sien le concept de « Quality by Design » (qualité par la conception), créé par Joseph Juran en 1992. Dans le document ICH Q8[4], on peut lire : « […] la qualité ne peut pas être testée dans les produits, c’est-à-dire que la qualité doit être conçue par la conception. »

 

La question est donc : comment le RQSE, qui n’est pas responsable du développement, peut-il intervenir efficacement auprès des acteurs de R&D, ou du bureau d’études, et des autres parties intéressées pour les amener à conduire rigoureusement les activités de conception ?

 

Hubert Bazin, consultant en management

 

Retrouvez l’ensemble des publications de ce rendez-vous éditorial « QSE : Tous les chemins mènent au ROME »

 


[1] ROME : Répertoire opérationnel des métiers et des emplois. Voir la fiche France Travail, « Responsable qualité en industrie » : https://candidat.francetravail.fr/metierscope/fiche-metier/H1502/responsable-qualite-en-industrie.

[3] Que Deming appelait « cycle de Shewhart », avec quatre étapes : PlanDoStudyAct.

    • Yvon MOUGIN
      Yvon MOUGIN

      Le RQSE n'est en effet pas responsable du développement de même qu'il n'est pas responsable du marketing et des ventes, ni des achats, ni encore des RH avec lesquels il collabore pour leur apporter des principes en matière de management de la qualité (évaluation du niveau de satisfaction des clients, maitrise des prestataires externes, etc.). Et pourtant, son rôle et sa mission étant d'intégrer la qualité dans les métiers (et dans la stratégie) de son entreprise, il peut d'une part expliquer la nécessité de satisfaire aux exigences du référentiel ISO 9001 relatif à la conception et au développement des produits et d'autre part contribuer également aux activités de conception en apportant des outils de la grande boite QSE. Pour la R&D, cela pourrait être entre autres (pour n'en citer que deux très connus) l'analyse fonctionnelle et l'Amdec Système.  

      • Daniele HUET-KOUO
        Daniele HUET-KOUO

        Le RQSE peut être source d'innovation notamment pour réduire les impacts environnementaux des produits et sociétals des services.

        • Hubert BAZIN
          Hubert BAZIN

          Très juste ! Dès lors que les dimensions "environnement" et "sécurité" font partie du périmètre, il est normal de travailler sur le cycle de vie du produit en cours de développement.

          • Judith KELLER
            Judith KELLER

            Le RQSE qui n'est pas compétent sur le fond l'est sur la forme. Je le vois comme une sorte de chef d'orchestre : il sait jouer de la musique mais pas de chacun des instruments...Il s'assure que tous ceux qui font partie de l'orchestre interviennent, et au bon moment (avec la bonne prise en compte du produit du berceau à la tombe), il apporte les outils et méthodes pour que chacun tienne son rôle, il s'assure dans les systèmes certifiés que toutes les étapes attendues soient bien présentes, mises en oeuvre et documentés pour valider la conformité du chapitre 8.3 le jour de l'audit, il peut animer les étapes de création et réflexion pour laisser les acteurs à leur concentration (par exemple lors d'AMDEC), ...effectivement bien au delà de  "Mettre en place une procédure de traitement des dossiers", d'où la nécessité d'une solide formation aux outils QSE, à l'animation des groupes de travail et à l'accompagnement des individus.